Visite : Arcelor Mittal teste certains usages de la 5G réplicables en logistique

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Présentée en 2021, l’expérimentation de 5G privée menée par ArcelorMittal prend forme. Le groupe sidérurgique a présenté sur le site pilote de Dunkerque différents usages de mobilité pour l’instant en 4G autour des audits de sécurité, de gestion des managers sur site et les zones de recyclage. Visite. (Photo : JC)

En novembre 2021, Arcelor Mittal, Orange Business Services et Ericsson avaient présenté leur stratégie de 5G industrielle, 5G Steel. Le groupe indien de sidérurgie souhaitait déployer cette technologie sur plusieurs sites pour en expérimenter plusieurs usages. Une visite était organisée le 2 février sur un de ces sites pilotes, à Dunkerque (Nord) sur lequel les équipes des différentes parties prenantes ont depuis un peu plus d’un an déployé le réseau.

Un réseau 5G ready, mais pas really

En quelques chiffres, 9 points hauts ont été installés couvrant les 450 ha d’espace concernés. Ils exploitent une bande de fréquence en 2,6 GHz avec une largeur de spectre de 20 MHz. Cette capacité radio est actuellement attribuée à la 4G LTE, mais avec des capacités en 5G. « Nous avons demandé à utiliser des fréquences complémentaires en 3,8 GHz (NDLR : réservée à la 5G SA stand alone) auprès de l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) et l’instruction est en cours », précise David Glijer, directeur de l’innovation chez Arcelor Mittal. « notre réseau est 5G ready, cela signifie que les infrastructures sont prêtes pour cette évolution ». Les cas d’usage présentés sur places n’en restent pas moins réalisés en 4G.

Du côté des partenaires, l’équipementier télécoms Ericsson a fourni les antennes et le cœur de réseau redondé. Orange Business Services intervient lui en tant qu’intégrateur d’infrastructure et de maintenance du réseau. Ce dernier peut accueillir jusqu’à 50 000 terminaux, principalement des tablettes durcies (Samsung et Getac). David Glijer ne communique pas sur le coût du projet, mais glisse « qu’en passant par du WiFi et de la fibre, l’investissement aurait été multiplié par 4 ». L’initiative est épaulée financièrement par le plan France relance.

Une des antennes Ericsson déployée pour couvrir la zone du train chaud continu. (Crédit Photo: JC)

La mobilité au sein du laminoir

Les audits de sécurité sont réalisés sur le terrain avec une tablette durcies. (Crédit Photo : JC)

En dehors de la partie technique, le projet 5G Steel vise clairement à mettre en avant les usages du réseau mobile . Le premier exemple se passe dans le TCC (train continu à chaud), un atelier de 600 m de long qui accueille des brames, des parallélépipèdes d’acier de 20 à 25 cm d’épaisseur. Ils sont chauffés et laminés pour finir en bobines de 1 km de tôle prêtes à livrer. Sur la ligne de production, des personnes réalisent des audits de sécurité pour vérifier que les employés respectent l’ensemble des règles. Habituellement ce travail nécessitait des aller-retours entre le bureau et le terrain pour les auditeurs. « Nous étions au papier-crayon pour recueillir les informations et nous perdions du temps sur la saisie », reconnait un des salariés d’ArcelorMittal. Même chose pour la consignation et la déconsignation d’une intervention de maintenance électrique ou mécanique. « Quand on bloque la production pour intervenir cela a un coût qui peut aller jusqu’à 30 000 euros de l’heure », insiste David Glijer. Tout ce qui peut être automatisé est donc un gain de temps et d’argent. Avec la couverture cellulaire 4G/5G, les formulaires peuvent être remplis en temps réel et sur place par l’employé et l’auditeur ou par le mainteneur. Ceux-ci disposent d’une tablette durcie avec une application développée sur SAP Fiori.

A quelques mètres de hauteur se situe le centre de contrôle du TCC, un poste de pilotage où plusieurs écrans sont disponibles et recueillent en temps réel des informations sur la chaîne de production. Un endroit où l’on retrouve le manager posté, « un responsable qui est proche de la production et souvent sur le terrain », explique l’un d’eux. Une tablette durcie sur laquelle le manager dispose des applications nécessaires, dont Outlook, Teams, OneDrive remplace le cheminement dans l’entrepôt, la collecte de données et la saisie. « Nous avons accès aux fichiers partagés, gérons les congés des collaborateurs, mais nous regardons aussi les performances de la ligne, réalisons des benchmarks des équipes, etc. », précise le manager. L’application PowerApps, outil de création d’applications métier de Microsoft trouve sa place sur la page d’accueil avec « des développements métier spécifiques comme la logistique, par exemple ».

Le cockpit du TCC collecte de nombreuses données utiles pour les managers postés. (Crédit Photo: JC)

Le recyclage de la ferraille sous surveillance

En cas de litige, un employé descend sur le terrain avec une tablette pour faire des vérifications. (Crédit Photo: JC)

Enfin dernier cas d’usage avec la mobilité en milieu industriel, la zone de recyclage de la ferraille. ArcelorMittal, comme beaucoup d’entreprises, s’est engagé dans un plan de décarbonation qui passe notamment par le cette démarche. « Nous atteignons 1 million de tonnes cette année et 2 millions l’année prochaine », pointe David Glijer. A Dunkerque, un vaste terrain est déstiné à la collecte et au stockage de la ferraille en attendant qu’elle soit recyclée. Un centre de pilotage accueille les camions chargés des déchets qui sont ensuite pesés. Et des caméras sur des portiques analysent la composition du chargement (densité, présence de graisses ou de gravats,…). Il arrive parfois qu’un litige soit ouvert sur ce chargement et nécessite donc l’intervention d’une personne. Equipée d’une tablette, elle va là aussi remplir un formulaire à distance avec la capacité de prendre une photo à titre de preuve.

L’ensemble des usages présentés ne nécessitent ni les importants débits, ni les faibles latences promis par la 5G privée. ArcelorMittal travaille sur des bras robotisés qui nécessiteront à terme, en revanche, ce type de performance. Mais l’écosystème a du mal à se mettre en place « nous sommes en attente des capteurs 5G certifiés Seveso », insiste le directeur de l’innovation d’ArcelorMittal. Dans les prochaines semaines, l’industriel va tester les trains autonomes de la start-up Otiv, dans laquelle le sidérurgiste a investi. « Les expérimentations portent sur le refoulement, c’est-à-dire la manœuvre pour faire reculer un train qui est guidé par un humain. Avec Otiv, cette tâche se fera de manière autonome avec des flux vidéos et nécessite de la 5G », observe David Glijer. Enfin, les lignes de production seront de plus en plus numérisées. C’est le cas de la prochaine qui sera développée à Mardyck (proche de Dunkerque) pour un investissement de 400 M€ et sera réservée à l’acier pour les moteurs électriques. « La ligne sera full digital et 5G by design », promet le dirigeant. Une occasion de revenir dans le Nord pour voir de la vraie 5G….

Jacques Cheminat 

Article original à retrouver sur le site de notre publication sœur Le Monde Informatique.

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